RussenKo présente la première rétrospective d’Igor Moukhin

 A l’occasion de sa quatrième édition, le Festival des cultures russe et russophones RussenKo propose – du 25 janvier au 24 février au Grand Réservoir de l’Hôpital Bicêtre – la première rétrospective en France du photographe russe Igor Moukhin. « La Russie d’Igor Moukhin : photographies de 1987 à 2012 » rassemble – sous les voûtes de ce lieu du XVIIème siècleclassé Monument Historique – 62 grands et moyens formats de l’un des plus talentueux photographes russes actuels. Christian Gattinoni, rédacteur en chef de lacritique.org est le commissaire d’exposition de cet événement unique.

« La Russie d’Igor Moukhin : photographies de 1987 à 2012 »

Première Rétrospective en France d’Igor Moukhin, Le Kremlin-Bicêtre (25 janvier – 24 février 2013)

Un photographe témoin des bouleversements de la Russie

Igor Moukhin est l’un des plus talentueux photographes russes actuels. Il a été le témoin d’évènements et de bouleversements importants : né sous l’ère du président Kroutchev, il a vécu à l’âge adulte la Perestroïka et la fin du régime soviétique, puis la Russie convertie au libéralisme, captant les multiples visages de la Russie.

Ses séries explorent ainsi la culture rock pendant la Perestroïka, les monuments soviétiques à l’abandon et les nouveaux visages de Moscou après l’éclatement de l’URSS. Travaillant principalement en noir et blanc, ses photos à la fois poétiques et théâtrales donnent un réel sentiment de présence.

Comme l’explique Christian Gattinoni, commissaire de l’exposition : « Toute une partie de son travail — que l’on retrouve dans les cinq séries photographiques présentées lors de cette première rétrospective — correspond à des Rémanences de cette histoire russe : ces marques, signes ou figures qui ont émaillé la période soviétique et ont perduré dans la société contemporaine. Avec Fragments, ces rémanences peuvent toucher au langage, aux logos, affiches et autres productions idéologiques reproduites en deux dimensions. D’autres vestiges — sculptures, monuments commémoratifs, etc…– croisés au hasard des promenades du photographe dans les villes, deviennent ce que Mouhkin nomme des Monuments, plus ou moins bien conservés, exaltant faits du passé, conquête de l’espace ou épopées guerrières et idéologiques. À chaque instant photographique, Igor Moukhin se positionne en témoin proche de ses concitoyens. Une proximité qui conserve un léger recul aussi bienveillant qu’amusé ou critique. Dans ces images des Corps en réclame, les visages ne sont pas plus importants que les attitudes corporelles. Souvent jouées ou exaltées par la présence de l’objectif, ces attitudes manifestent dans ce jeu social l’exigence nouvelle d’un corps qui cherche à se singulariser. Des « portraits » pris dans le mouvement de la vie, de la ville, empreints de Dynamismes qui semblent énoncer comment les individus revendiquent et assument leurs comportements ».

L’école russe de la rue

Une utilisation massive du noir et blanc et de la série pour témoigner de moments historiques font ainsi d’Igor Moukhin l’un des représentants les plus innovants d’une autre école de la rue, l’école russe de la rue. Et Christian Gattinoni de poursuivre : « S’il est une tradition que prolonge Igor Moukhin, qu’il actualise et fait sienne en référence à sa propre culture, c’est celle de l’école de New York, et de façon plus générale, celle dite « école de la rue ». Comme l’écrit Jorge Ribalta dans son Petit vocabulaire pour Helen Levitt:

« Dans la culture moderne, la rue est le demos, l’espace démocratique, l’espace des gens anonymes et de la vie sociale. Les gens dans la rue représentent la souveraineté populaire, indissociable de la construction de la démocratie et des notions d’égalité et de citoyenneté. À l’ère de la page imprimée, la photographie a pour mission de construire l’image du citoyen anonyme de l’homme de la rue, du sujet populaire de la démocratie de masse qui naît justement  avec l’apparition de la photographie dans la presse. »

 Mais il faut étudier de nouveau les images du photographe pour mieux appréhender leur spécificité, leur caractère contemporain. Même lorsqu’il opère dans l’instantané, Moukhin organise souvent son cadrage en hiérarchisant les différents espaces représentés. Ses premiers plans sont souvent encombrés par la présence de matières qui font écran ou encore — dans la tradition mise en avant par John Szarkowski dans sa fameuse exposition  Mirrors and windows —, de miroirs, fenêtres, ou vitrines. De façon plus singulière, le photographe place aussi en premier plan des objets du quotidien ou liés aux actions revendicatives (affiches, drapeaux,  banderoles etc.).

La situation principale ne se donne jamais à voir directement : elle se trouve toujours mise à distance et nécessite un effort pour être découverte. Ce déchiffrement d’une réalité par delà les écrans, invite le spectateur à une attention plus soutenue que celle qu’on n’accorde habituellement aux images ».*

 *Extrait du catalogue de l’exposition «  La Russie d’Igor Moukhin, photographies de 1987 à 2012 »

 Informations pratiques :